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ppcaillou
29 octobre 2018

Académie du jeudi

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Arno Stern est né le 23 juin 1924 ( 94 ans ) à Kassel, en Allemagne. 

Il fuit le nazisme, avec ses parents, qui s’installent en France en 1933. Ayant survécu aux poursuites, à la clandestinité, et après l’internement dans un camp de travail, il prend dans la banlieue parisienne en 1946 la responsabilité d'un atelier de peinture dans une maison pour orphelins de guerre. Il constate alors que les créations des enfants sont d'autant plus riches et personnelles quand elles sont effectuées librement, sans proposition de thème.


Il crée en 1948 un premier atelier à Paris, appelé  ACADEMIE DU JEUDI , où il met en application ces idées avec des personnes de tous âges. Il installe également des ateliers dans des hôpitaux. Depuis 1960, il forme de nombreux élèves en France et dans le monde.

 

Arno Sternjeu-de-peindre-wels

Son approche se distingue de l'art-thérapie avec laquelle elle pourrait être confondue. Arno Stern tient à cette distinction et au fait que ce qu'il propose n'est pas une thérapie mais plutôt une pratique qui est source de bienfait pour le développement des êtres (enfants ou adultes) sans chercher à atteindre aucun but proprement thérapeutique.

Arno Stern mit au point les conditions qu'il considérait comme idéales pour un atelier libre :
un lieu clos, LE CLOSLIEU , sans fenêtre, protégé du monde extérieur ;
une table-palette mettant à disposition les couleurs sans nécessité de préparation ;
À ces conditions matérielles s'ajoutent des règles du lieu :
les peintures ne sortent jamais de l'atelier, et ne sont pas destinées à être vues ou commentées par d'autres personnes ;
l'enfant ou l'adulte ne doit pas être influencé, il peint ce qu'il souhaite, et décide seul si son dessin est terminé.

« Le Jeu de peindre fonctionne, dans le Closlieu, selon un dispositif offrant, à la fois, la liberté de tracer selon la nécessité profonde de la personne, et reposant sur une très stricte discipline.
Il a lieu avec régularité, dans un groupe de 15 participants au maximum, ayant des âges divers (5 à 50 ans).
Chacun dispose de sa feuille, y trace selon une spontanéité retrouvée, le Closlieu crée les conditions favorables à la Formulation, une manifestation sans précédents dans l’histoire de l’humanité – la Formulation, un code original et universel, en prise directe avec la Mémoire organique. »

Le dessin enfantin est généralement considéré comme le produit de l’imagination. Pour Arno Stern, il est dicté par une nécessité organique, et il s’accomplit selon des lois spécifiques qui, seules, permettent de le comprendre. Il se dit l'initiateur d’un nouveau domaine scientifique : la sémiologie de l’expression.
Arno Stern a fait, entre 1966 et 1972, de nombreux séjours, dans le désert, la brousse, la forêt vierge, où il a fait peindre des populations non influencées par les apports de notre culture. Selon lui, et d'après les constatations qu'il a faites lors de ces voyages, l'expression créative des enfants suit des normes internes, qui font que l'on retrouve des formes similaires dans des cultures totalement différentes. Arno Stern a répertorié soixante dix formes.

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On peut trouver l' Académie du Jeudi, distributeur officiel du matériel Arno Stern, 61 rue Falguière à Paris Xvème

11156176_902650053130249_4560896523629013941_nDans la même rue au 63, donc juste à côté, on trouve le bistrot

        « AUX ARTISTES »

 

 

 

 

 

en hommage à l'atelier du n°14 de la Cité Falguière 

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qui hébergea notamment FOUJITA et MODIGLIANI 

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22 mai 2018

ouf ! ...

Moqueur - Bouge fesses

Le dessin n'est pas la forme, il est la manière de voir la forme

Edgar DEGAS

 

.... ça m'arrange, merci Monsieur DEGAS

22 octobre 2016

Les bonnes nouvelles, ça existe ...

Un couple d‘Américains va léguer à la France, et plus précisément au Musée d'Orsay, une importante collection de tableaux, parmi lesquels des Bonnard et des Vuillard. «Cette donation exceptionnelle par sa taille et sa cohérence est la plus importante que les musées français aient reçue d'un donateur étranger depuis 1945», a précisé le ministère de la culture. Elle est évaluée à 350 millions d'euros actuellement mais elle continue à s'enrichir, a-t-il encore affirmé.

La collection de Spencer et Marlene Hays comprend quelque 600 œuvres de la seconde moitié du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle. Une première donation de 187 œuvres, estimée à 173 millions d'euros, va être formalisée samedi soir à l'Élysée en présence de François Hollande. Parmi les œuvres remises samedi, 69 appartiennent au courant nabi (Bonnard, Vuillard, Odilon Redon, Maurice Denis). Ce mouvement artistique a été fondé en 1888 par de jeunes peintres indépendants qui tentèrent d'adapter les tendances symbolistes à l'art de la peinture.



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Pierre Bonnard

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Edouard Vuillard

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Odilon Redon

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Maurice Denis

24 août 2016

Rencontre des artistes ( 14ème édition )

2016 - Rencontre des artistes - 14ème

24 août 2016

Marché nocturne de l'art et du goût

2016 - Marché de l'art et du goût

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14 mai 2016

Il y a des signes qui trompent

 

  ... Une petite histoire pour tous ceux qui s'escriment à dessiner avec parfois l'impression, selon le moral du jour, de perdre leur temps ...

 
 
cyIl était une fois il y a bien longtemps, dans une province du lointain royaume de Chine, un peintre qui savait dessiner d'un seul trait de pinceau, nénuphars, oiseau, forêts, rochers, vagues et nuages.
Son génie était si grand que sa renommée s'étendit bien vite au- delà de son village, dépassant les frontières de sa province, pour parvenir un jour aux oreilles de l'empereur. Celui- ci le fit mander en son palais.
 
- " On dit que tu es le meilleur peintre de mon empire et je veux m'en assurer. Je t'ordonne donc de me peindre.un cygne, que jamais de mes yeux n'aient vu plus beau cygne en ce monde et je ferai de toi l'homme le plus riche du pays. Combien de temps te faudra-t-il ? "
 
- " Dix ans mon seigneur ".
 
- " Dix ans. pour un cygne ? "
 
- " Dix ans pour un beau cygne mon seigneur ".
 
- " Bien ", dit l'empereur impassible. " J'accepte ; et je viendrai moi-même le chercher. Dans dix ans jour pour jour "
 

Les années passèrent.... A la date prévue, L'empereur se présenta, entouré de notables, dans la modeste maison du peintre.
 
- " Je viens chercher mon cygne ! Où est-il ? "
 
- " Je vous attendais mon seigneur ", répondit l'artiste ; et il alla chercher une grande feuille de papier de riz, toute blanche.... Il trempa son pinceau dans l'encre spécialement préparée, et devant l'assistance ébahie, il dessina d'un seul trait l'oiseau promis au maître dix années auparavant.
 
- " C'est le plus beau cygne que j'ai vu de ma vie ", dit l'empereur ravi par tant de finesse et de splendeur. " Je te félicite et te remercie. Ta femme et tes enfants pourront vivre riches jusqu'à la fin de leurs jours ; je leur offre, devant témoins, un palais, un lac, un bois et des champs. Mais toi, grand artiste, tu n'en jaugeras point car je te ferai couper la tête pour t'être moqué de moi ".Le peintre se laissa enchaîner sans mot dire, devant sa famille en larmes, l'empereur et sa suite s'apprêtaient à repartir quand l'un de ses fils, prince de sang, lui cria d'une autre pièce où son insatiable curiosité l'avait attiré :
 
 
- "Père, venez voir, venez vite ! " 
 
L'empereur traversa la salle à manger et rejoignit son fils dans l'atelier de l'artiste.
Par terre, sur les tables, accrochés au mur, partout, des monceaux, des liasses de feuilles de papier de riz, avec des milliers, des millions de cygnes dessinés. Le peintre consciencieux s'était exercé pendant dix années, jour et nuit, pour être capable de créer devant les yeux de son empereur une oeuvre digne de lui

12 avril 2016

Un Caravage a-t-il été découvert dans un grenier en France ?


Le tableau représentant la décapitation d'Holopherne par Judith retrouvé dans un grenier de la région de Toulouse où il séjournait peut-être depuis 150 ans ...

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Michelangelo Merisi da Caravaggio, en français Le Caravage, est un peintre né le 29 septembre 1571 à Milan et mort le 18 juillet 1610 à Porto Ercole.
Son œuvre révolutionne la peinture du xviie siècle par son caractère naturaliste, son réalisme parfois brutal et l'emploi appuyé de la technique du clair-obscur allant jusqu'au ténébrisme. Il connaît la célébrité de son vivant et il influence nombre de grands peintres après lui, comme en témoigne l'apparition du caravagisme.

( ndlr : ça n'est toutefois pas lui qui inventa le caravaning, c'est tout c'que j'sais ... on ne peut pas tous avoir ... )

1 avril 2016

Frida Kahlo

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Magdalena Frida Carmen Kahlo Calderón, ou

Frida Kahlo, née le 6 juillet 1907 à Coyoacán au Mexique et morte le 13 juillet 1954 dans la même ville, est une artiste peintre mexicaine.

En 1922, elle falsifie sa date de naissance en 7 juillet 1910, année du début de la révolution mexicaine.

 La mère de Frida Kahlo, Matilde Calderón y González (1876-1932), est née à Mexico. Elle est la troisième fille d’Isabel González y González, issue d'une famille de généraux espagnols, et du photographe Antonio Calderón, d’origine amérindienne et venant de Morelia. Son père, Carl Wilhelm Kahlo (1871-1941), né à Pforzheim dans le Grand-duché de Bade en Allemagne, n'était pas, comme le voudrait une légende répandue, juif d'origine germano-austro-hongroise, mais un allemand de confession luthérienne, fils du bijoutier et orfèvre Jakob Kahlo et de Henriette Kaufmann, issu de la bourgeoisie badoise. Arrivé au Mexique en 1891 à l'âge de 19 ans, il s'appellera dès lors Guillermo Kahlo.

 


 

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Magdalena Frida Carmen naît dans la « Maison bleue » (la « Casa azul »), actuel musée Frida Kahlo, au milieu d’un quartier où habite la petite bourgeoisie, Coyoacán, au sud de Mexico. C’est la troisième des quatre filles de Matilde et Guillermo Kahlo.Frida Kahlo peint en 1936 Mes grands-parents, mes parents et moi où elle raconte l’histoire de ses origines, tel un arbre généalogique. Elle a symbolisé ses grands-parents maternels mexicains par la terre, et ses grands-parents paternels allemands au moyen de l’océan. Elle est la petite fille du jardin de la « Maison bleue » où elle est née et décédée. Au-dessus figurent ses parents dans la pose de leur photo de mariage, puis ses grands-parents paternels et maternels.

À l'âge de six ans, Frida est victime d'une poliomyélite. La conséquence est que sa jambe droite s’atrophie et son pied ne grandit plus. Il n'atteindra jamais la taille qu'il devrait avoir. C'est ce qui lui vaudra le surnom de « Frida la coja » (Frida la boiteuse) par ses camarades de classe. Il a été supposé qu'elle souffrait de spina bifida, une malformation congénitale de la colonne vertébrale, qui pourrait également avoir affecté le développement de la jambe.

 

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En 1922, alors âgée de 16 ans, elle quitte le cours supérieur du Colegio Alemán à Mexico et intègre la Escuela Nacional Preparatoria, considérée comme le meilleur établissement scolaire du Mexique. Frida Kahlo est l'une des trente-cinq premières filles admises sur un total de 2 000 élèves. Elle s'intéresse beaucoup aux sciences naturelles et souhaite alors devenir médecin. Malgré l’intérêt qu’elle porte aux beaux-arts, qu'elle doit à son père, excellent photographe et accessoirement peintre d'aquarelles, elle n’envisage pas de se lancer dans une carrière artistique.

 

Le 17 septembre 1925, Frida prend le bus pour rentrer chez elle après ses cours. Soudain, l’autobus sort de la route et percute un tramway. Plusieurs personnes trouvent la mort lors de l’accident. Frida, elle, est grièvement blessée. Sa jambe droite subit un grand nombre de fractures, onze au total. Son pied droit est également cassé. Le bassin, les côtes et la colonne vertébrale sont eux aussi brisés. Elle reste alitée pendant trois mois, dont un mois à l’hôpital. Mais environ un an après l’accident, elle doit retourner à l’hôpital, car on remarque qu’une de ses vertèbres lombaires est fracturée. Frida sera contrainte de porter durant neuf longs mois des corsets en plâtre. C’est alors qu’elle commence à peindre. Pour l'aider, ses proches placent un baldaquin au-dessus de son lit avec un miroir pour ciel. Elle peut ainsi se servir de son reflet comme modèle, ce qui est probablement l'élément déclencheur de la longue série d'autoportraits qu'elle réalisera. En effet sur 143 tableaux, 55 relèvent de ce genre. L'artiste doit subir de nombreuses interventions chirurgicales qui l'obligent à rester couchée sur un lit d'hôpital.

 

 

En 1928, son amie la photographe Tina Modotti l'incite à s’inscrire au Parti communiste mexicain. Elle s’intéresse particulièrement à l’émancipation des femmes dans la société mexicaine qui est encore très machiste. Elle décide dès son jeune âge qu'elle ne veut pas suivre le même parcours que la plupart des femmes mexicaines. Elle a un désir de voyages, d'études. Elle veut la liberté et le plaisir. Cette même année, Frida rencontre pour la première fois Diego Rivera (1886-1957) dans l'auditorium de son école (celui-ci y faisait une peinture murale).

 Elle admire beaucoup ce peintre et lui demande son avis au sujet de ses propres tableaux, le fond de sa pensée. Le muraliste est impressionné par les réalisations de la jeune Mexicaine :

« Les toiles révélaient une extraordinaire force d’expression, une description précise des caractères et un réel sérieux. Elles possédaient une sincérité plastique fondamentale et une personnalité artistique propre. Elles véhiculaient une sensualité vitale encore enrichie par une faculté d’observation impitoyable, quoique sensible. Pour moi, il était manifeste que cette jeune fille était une véritable artiste. »

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Frida Kahlo épouse Diego Rivera, de 21 ans son aîné, le 21 août 1929. Ils s’installent à Mexico dans un atelier, mais Diego ne tarde pas à la tromper. Elle-même s'engage dans de nombreuses relations extra-conjugales ; bisexuelle, elle séduit de nombreux hommes et femmes. Bien que compliquée, leur relation est véritablement passionnée.

 

En novembre 1930, ils emménagent à San Francisco car Rivera a été chargé de réaliser des peintures murales. Frida y fait la connaissance d’artistes, de commanditaires et de mécènes, dont Albert Bender. Celui-ci est parvenu à obtenir une autorisation d’entrée aux États-Unis pour Diego Rivera. En remerciement, Frida réalise en 1931 le portrait double Frida Kahlo y Diego Rivera inspiré de leur photo de mariage.

 

En 1930, elle subit sa première fausse couche. Après l’accident, on lui avait pourtant dit qu’elle ne pourrait jamais avoir d’enfant à cause de son bassin, fracturé à trois endroits. Lors de leur séjour à Détroit, elle est de nouveau enceinte. Au début de cette deuxième grossesse, Frida voit un médecin qui lui conseille de garder l'enfant au lieu d'interrompre sa grossesse. Elle pourrait accoucher par césarienne. Malgré les prévisions du docteur, elle fait une autre fausse couche. Elle reflète ses sentiments, son impression de solitude et d’abandon après la perte de l’enfant dans le tableau Henry Ford Hospital ou Le Lit volant, dans lequel elle peint un fœtus masculin surdimensionné en position embryonnaire, l’enfant perdu lors de la fausse couche, le « petit Diego » qu’elle avait tant espéré porter jusqu’à terme.

 Après ce pénible épisode, Frida Kahlo peint des tableaux qui traduisent sa lassitude et son dégoût des États-Unis et des Américains alors que son mari, lui, reste fasciné par ce pays et ne veut pas le quitter. Elle exprime son point de vue sur le pays des « gringos » dans Autoportrait à la frontière entre le Mexique et les États-Unis et dans Ma robe est suspendue là-bas. Malgré son admiration pour le progrès industriel des États-Unis, la nationaliste mexicaine se sent mal à l’aise de l'autre côté du Río Bravo. Entre-temps, la mère de Frida meurt le 15 septembre 1932

 Dans les années 1930, après l'arrivée au pouvoir des nazis en Allemagne, Frida écrit son nom « Frieda », de Frieden, la paix en allemand.

 En décembre 1933, Diego Rivera consent à rentrer au Mexique. Ils s’installent dans une maison à San Ángel, construite par un ami architecte et peintre, Juan O’Gorman. Des difficultés de santé obligent Frida à retourner à l’hôpital où elle doit subir un nouveau curetage.

 

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En 1935, elle ne réalise que deux tableaux dont Quelques petites piqûres, qui évoque un meurtre par jalousie perpétré sur une femme. Frida Kahlo découvre que son mari a une liaison avec sa sœur, Cristina. Profondément blessée, elle quitte le foyer pour un appartement au centre de Mexico. Pendant cette période, elle a plusieurs relations extraconjugales, notamment avec des femmes. Au milieu de 1935, elle part avec deux amies pour New York. Elle ne revient au Mexique qu'après la fin de la liaison entre sa sœur et son mari, à la fin de l'année.

 Le 9 janvier 1937, le président Lázaro Cárdenas del Río accorde, conformément à ses pouvoirs constitutionnels, l'asile politique à Léon Trotski. Lui et sa femme sont accueillis par Frida et Diego, à la Casa azul (la Maison bleue). Une brève liaison que l'on dit passionnée se développe entre Trotski et Frida. À la fin de cette aventure, l'artiste lui offre « affectueusement » pour son anniversaire, le 7 novembre 1937, Autoportrait dédié à Léon Trotski ou Entre les rideaux où elle se montre sous son meilleur jour avec une dédicace :

« Pour Léon Trotski, je dédicace cette peinture avec tout mon amour… »

 

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En septembre 1938, André Breton est envoyé à Mexico par le ministère des Affaires étrangères pour y prononcer une série de conférences sur l'état de la poésie et de la peinture en Europe. Avec sa femme Jacqueline Lamba, il est accueilli à Mexico par le couple Kahlo-Rivera. Frida Kahlo se défend d'être surréaliste : « On me prenait pour une surréaliste. Ce n’est pas juste. Je n’ai jamais peint de rêves. Ce que j’ai représenté était ma réalité. »  Breton, subjugué par Frida, écrit : « l'art de Frida Kahlo de Rivera est un ruban autour d'une bombe », tandis qu'une véritable et profonde amitié se noue entre Frida et Jacqueline :

 Au début du mois d’octobre 1938, Frida Kahlo présente ses œuvres dans la galerie de Julien Levy à New York. La moitié des vingt-cinq œuvres présentées y sont vendues. Pendant son séjour, elle a une liaison avec le photographe Nickolas Muray.

 En 1939, Frida se rend à Paris à la grande exposition sur le Mexique organisée par le gouvernement Lázaro Cárdenas à la galerie Renou et Pierre Colle. Elle loge chez André Breton et rencontre les peintres Yves Tanguy, Picasso et Vassili Kandinsky.

Elle n'aime pas Paris, qu'elle trouve sale, et la nourriture ne lui convient pas ; elle attrape une colibacillose. L'exposition lui déplaît : son avis est « qu'elle est envahie par cette bande de fils de putes lunatiques que sont les surréalistes », elle trouve superflue « toute cette saloperie » exposée autour du Mexique. Par-dessus le marché, l'associé de Pierre Colle refuse d'exposer les œuvres de Frida dans sa galerie, choqué par la crudité des tableaux.

Dans une lettre à Nickolas Murray, elle fait part de son profond dégoût pour les intellectuels parisiens :

« Ils ont tellement de foutus intellectuels pourris que je ne peux plus les supporter. Ils sont vraiment trop pour moi. J'aimerais mieux m'asseoir par terre dans le marché de Toluca pour vendre des tortillas que d'avoir quoi que ce soit à voir avec ces connards artistiques de Paris… Je n'ai jamais vu Diego ni toi perdre leur temps à ces bavardages stupides et ces discussions intellectuelles. C'est pour ça que vous êtes de vrais hommes et non des artistes minables — Bon sang ! ça valait la peine de venir jusqu'ici juste pour comprendre pourquoi l'Europe est en train de pourrir, pourquoi tous ces incapables sont la cause de tous les Hitler et les Mussolini. »

 

En décembre 1938, Frida et Diego divorcent. Elle ressent de grandes douleurs dans la colonne vertébrale et contracte une mycose aiguë à la main droite. En septembre 1940, elle se rend à San Francisco pour être soignée par le docteur Eloesser. Pour le remercier de ses soins, elle peint pour lui Autoportrait dédié au Dr Eloesser. Le tableau porte en dédicace :

« J’ai peint mon portrait en 1940 pour le Dr. Eloesser, mon médecin et meilleur ami. Avec toute mon affection, Frida Kahlo. »

 

kahlo 2Diego Rivera est également à San Francisco à la même époque, et propose à Frida de l’épouser de nouveau. Elle accepte, et le second mariage a lieu à San Francisco le 8 décembre 1940, jour de l’anniversaire de Diego. Ils s’installent dans la Casa azul à Coyoacán après la mort du père de Frida.

 En 1942, l’artiste commence son journal où elle commente son enfance, sa jeunesse et sa vie. La même année, elle est élue membre du Seminario de Cultura Mexicana, organisation créée par le ministre des Affaires culturelles et composée de vingt-cinq artistes et intellectuels. Elle a pour mission d'encourager la diffusion de la culture mexicaine en organisant des expositions, des conférences et la publication d'ouvrages.

 

En 1943, Frida dirige une classe de peinture à l’académie des Beaux-Arts. Mais sa mauvaise santé l'oblige à enseigner chez elle. Des douleurs permanentes dans le pied droit et dans le dos l’empêchent de marcher correctement. Elle doit porter un corset de fer (que l’on retrouve dans La Colonne brisée). En juin 1946, elle subit une opération de la colonne vertébrale qui lui laisse deux immenses cicatrices dans le bas du dos.

À la fin des années 1940, l’état de santé de Frida Kahlo s'aggrave et, en 1950, elle doit rentrer à l’hôpital ABC de Mexico. Elle y reste neuf mois. Sa nouvelle opération de la colonne vertébrale se complique d'une inflammation qui l'oblige à une troisième opération. Ce n'est qu'au bout de la sixième intervention (sur un total de sept) qu’elle peut se remettre à peindre, tout en restant couchée. Au printemps 1953, la photographe Lola Álvarez Bravo organise la première exposition monographique de Frida Kahlo au Mexique. Son médecin lui interdisant de se lever, c'est sur son lit d'hôpital qu'elle est transportée jusqu'à la galerie pour participer au vernissage.

 

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En août 1953, on lui ampute la jambe droite jusqu’au genou à cause d'une gangrène. Cette opération apaise ses souffrances, mais la plonge dans une profonde dépression :

« On m’a amputé la jambe il y a six mois qui me paraissent une torture séculaire et quelques fois, j’ai presque perdu la tête. J’ai toujours envie de me suicider. Seul Diego m’en empêche, car je m’imagine que je pourrais lui manquer. Il me l’a dit, et je le crois. Mais jamais de toute ma vie je n’ai souffert davantage. J’attendrai encore un peu… »

 

Affaiblie par une grave pneumonie, Frida Kahlo meurt dans la nuit du 13 juillet 1954, sept jours après son quarante-septième anniversaire, officiellement d'une embolie pulmonaire. Cependant, selon Hayden Herrera, les derniers mots de son journal (« J'espère que la sortie sera joyeuse… et j’espère bien ne jamais revenir — Frida ») et son dernier dessin suggèrent qu'elle se serait suicidée ; il affirme d'ailleurs qu'une minorité de ses amis a cru que sa mort était due à une overdose de médicaments qui n'était peut-être pas accidentelle. Toutefois, en travers de son dernier tableau, peint juste avant de mourir, elle a écrit : « Viva la Vida » .

 

Elle est incinérée le 14 juillet, comme elle le désirait : elle avait expliqué qu'elle ne souhaitait pas être enterrée couchée, ayant trop souffert dans cette position au cours de ses nombreux séjours à l'hôpital. Ses cendres reposent dans la Casa azul à Coyoacán, sur son lit, dans une urne qui a la forme de son visage.


Pour les amateurs de Frida et Diego, il y a, à Lyon, rue Georges Gouy (si je ne me trompe pas ) dans le 7ème, une place avec de magnifiques peintures murales à la gloire de Riveira. Sur l'une d'elles on aperçoit Frida. J'espère qu'aujourd'hui elle est encore en état … 

1 avril 2016

Pierre Aleschinsky


alechinsky 5Pierre Alechinsky, né le 19 octobre 1927 à Schaerbeek (Bruxelles), est un peintre et graveur, qui réunit dans son œuvre expressionnisme et surréalisme. Il est le père du poète Ivan Alechine et du sculpteur Nicolas Alquin.

Le père de Pierre Alechinsky est un juif russe et sa mère est wallonne. Tous deux sont médecins. Dans les années 1930, Alechinsky étudie à l'école Decroly à Bruxelles, il est un étudiant modéré. On oblige l’enfant gaucher à écrire de la main droite. La gauche, sa meilleure main, les éducateurs la lui laisseront pour les travaux « de moindre importance » : le dessin...

De 1944 à 1948, il étudie l'illustration du livre, la typographie, les techniques de l'imprimerie et la photographie à l'École nationale supérieure d'Architecture et des Arts visuels de La Cambre à Bruxelles. C'est pendant cette période qu'il découvre l'œuvre d'Henri Michaux, de Jean Dubuffet et des surréalistes. Il rencontre et se lie d'amitié avec le critique d'art Jacques Putman, qui consacrera de nombreux écrits à son œuvre. Il commence à peindre en 1947 et fait alors partie du groupe Jeune Peinture belge, qui réunit notamment Louis Van Lint, Jan Cox, et Marc Mendelson.

Pierre Alechinsky devient très rapidement l'un des acteurs majeurs du monde artistique belge de l'après-guerre. Il fonde avec Olivier Strebelle et Michel Olyff dans une maison communautaire, les Ateliers du Marais. Après sa rencontre avec le poète Christian Dotremont, l'un des fondateurs du groupe CoBrA (mouvement créé en 1948, regroupant des artistes issus de Copenhague, Bruxelles et Amsterdam, qui préconise un retour à un art plus provocant, agressif et audacieux), il adhère en 1949 à ce mouvement d'avant-garde artistique, rejoignant Karel Appel, Constant, Jan Nieuwenhuys et Asger Jorn. Il participe aussitôt à la « Première exposition internationale de CoBrA » au Stedelijk Museum.

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Pendant la brève existence du groupe, il s'y implique très fortement, organisant des expositions, comme la « Deuxième exposition internationale d'art expérimental CoBrA » au palais des beaux-arts de Bruxelles (1951), et contribuant à la réalisation de la revue « CoBrA ». Le rôle capital que joue pour lui le mouvement CoBrA tient autant aux personnes qu'aux idées défendues : spontanéité sans frein dans l'art, d'où rejet de l'abstraction pure et du « réalisme socialiste », refus de la spécialisation. Après la dissolution du groupe CoBrA, dont il perpétuera l'esprit (« CoBrA, c'est mon école », a-t-il pu dire), Pierre Alechinsky s'installe à Paris, où il va côtoyer les surréalistes. Il va compléter sa formation de graveur et s'initier à de nouvelles techniques à l'Atelier 17, dirigé par Stanley Hayter. C'est l'époque, à partir de 1952, où il se lie d'amitié avec Alberto Giacometti, Bram van Velde, Victor Brauner et où il commence une correspondance régulière avec le calligraphe japonais Shiryu Morita de Kyōto.

En 1954, il fait la connaissance du peintre chinois Walasse Ting, qui aura une grande influence dans l'évolution de son œuvre.

Alechinsky présente, cette même année, sa première exposition personnelle à la galerie Nina Dausset, à Paris. Sa première grande exposition est organisée en 1955 au Palais des beaux-arts de Bruxelles. En 1958, c'est l'Institute of Contemporary Arts de Londres qui accueille ses œuvres (Alechinsky : encres). En 1960, lors de la XXXe Biennale de Venise, il expose au Pavillon belge.

Il abandonne progressivement l'huile pour des matériaux plus rapides et plus souples comme l'encre, qui lui permet de donner libre cours à un style fluide et sensible. Fasciné par la calligraphie orientale, dont la spontanéité l'attire, il effectue plusieurs voyages en Extrême-Orient et tourne en 1955 à Kyōto un film documentaire sur cet art traditionnel japonais (Calligraphie japonaise). Même si La nuit (Ohara Museum of art, Kurashiki - 1952) contient déjà cette inspiration de l'Extrême-Orient par la rencontre entre signe et écriture hors du champ de la couleur, le film Calligraphie japonaise, monté en 1958, témoigne de l'impact de cette découverte sur sa propre technique. Christian Dotremont en a écrit le commentaire et André Souris la musique.

Soutenu par la Galerie de France, il effectue, à partir des années 1960, de fréquents séjours à New York, où il découvre en 1965 une technique qui lui conviendra bien, la peinture acrylique, à laquelle l'initie Walasse Ting. Cette même année, il crée son œuvre la plus célèbre Central Park, avec laquelle il inaugure la peinture « à remarques marginales », inspirée de la bande dessinée2, où l'image centrale est entourée, sur les quatre côtés, d'une série de vignettes destinées à compléter le sens du tableau. L'interaction entre les deux zones est à la fois énigmatique et fascinante.

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Toujours en 1965, André Breton, un an avant sa mort, invite Pierre Alechinsky à participer à la XIe Exposition internationale du Surréalisme, « L'Écart Absolu ».

Il illustre le Traité des excitants modernes d'Honoré de Balzac en 1989. Le livre, accompagné d'une postface de Michel Butor est publié par Yves Rivière.

En 1975, le Ministère de la culture lui commande un service de table qu'il a réalisé en collaboration avec la Manufacture de Sèvres, il sera complété l'année suivante par un service à café au chiffre de Michel Guy.. Entre 2000 et 2004, il revient régulièrement dans les ateliers de la manufacture pour peindre des décors sur le service Diane, une forme de service de table issue du répertoire de Sèvres - Cité de la céramique.

En 1998 La Galerie nationale du Jeu de Paume, à Paris lui consacre une exposition. En 2004, nouvelle exposition au Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou, Paris

En 1992, on lui confie la décoration de la rotonde d'accès de l'Hôtel de Lassay à l'Assemblée Nationale3.

En avril 2006, il est fait chevalier de la Légion d'honneur en France.

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En 2006, dans Trou (revue d'art) no 16, paraît le travail « Main courante » qu'il a créé spécialement pour cette revue et dont l'édition de tête contient une eau-forte intitulée Temps passé tirée sur des feuilles d'un ancien registre des douanes françaises.

De décembre 2007 à mars 2008, à l'occasion des quatre-vingts ans d'Alechinsky, les Musées royaux des beaux-arts de Belgique de Bruxelles lui rendent hommage à travers une exposition rétrospective de l'ensemble de la carrière de l'artiste et c'est à cette occasion qu'il déclara que l'Art actuel n'est qu'une question de relation.

La galerie Lelong à Paris représente et expose régulièrement l'œuvre de Pierre Alechinsky depuis 1979.

Il a fait partie des jurys chargés du jugement des œuvres et projets présentés aux Prix Godecharle.

30 mars 2016

Berthe Morisot

 

Morisot 1

Berthe Marie Pauline Morisot (née le 14 janvier 1841 à Bourges - morte le 2 mars 1895 à Paris) est une peintre française, membre fondateur et doyenne du mouvement d'avant-garde que fut l'Impressionnisme.

Elle était dans le groupe impressionniste, respectée par ses camarades et admirée. À sa table, se réunissent son beau-frère Édouard Manet qui est le plus mondain, Edgar Degas, le plus ombrageux, Pierre-Auguste Renoir, le plus sociable, et Claude Monet le plus indépendant du groupe. Stéphane Mallarmé l'introduit auprès de ses amis écrivains.

Les étapes de la carrière de Berthe Morisot ne sont pas très marquées, car elle a détruit toutes ses œuvres de jeunesse. C'est à peine si l'on discerne une influence de Manet ou de Renoir vers la fin de sa vie.

Après sa mort, la galerie Durand-Ruel a organisé une rétrospective de ses peintures, aquarelles, pastels, dessins et sculptures : il y avait plus de quatre cents pièces.

Le musée Marmottan lui a consacré une grande rétrospective de mars à août 2012. C'était la première rétrospective qu'on lui accordait à Paris depuis près de cinquante ans.

Berthe Morisot était une « rebelle ». Tournant le dos très jeune à l'enseignement académique du peintre lyonnais Chocarne, elle a fondé avec Claude Monet,Auguste Renoir, Alfred Sisley, Camille Pissarro, Edgar Degas le groupe d'avant-garde les « Artistes Anonymes Associés », qui allait devenir la Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs regroupant des impressionnistes. Sa volonté de rupture avec les traditions, la transcendance de ses modèles, et son talent ont fait d'elle « la grande dame de la peinture » selon Anne Higonnet.



Berthe Morisot naît à Bourges où son père, Edme Tiburce Morisot, est préfet du département du Cher. Sa mère Marie-Joséphine-Cornélie Thomas est l'arrière-petite-nièce du peintre Jean Honoré Fragonard. La famille s'installe définitivement à Paris en 1852.

Morisot 2

Berthe avait deux sœurs. L'une, Yves, 1838-1893, devint plus tard Madame Théodore Gobillard, peinte par Edgar Degas sous le titre Madame Théodore Gobillard. Yves est bien le prénom de la jeune fille. Sa deuxième sœur, Edma, 1839-1921, pratiquait la peinture avec Berthe dont elle a fait le portrait en 1865. Les deux sœurs exposèrent ensemble pour la première fois au Salon en 1864, mais Edma abandonna ses pinceaux aussitôt après son mariage avec un officier de marine de Cherbourg. Les sœurs Morisot avaient aussi un frère, Tiburce, dont on ne connaît rien d'autre que la date de naissance (1848)

C'est le père qui rapporte les propos enflammés que Joseph Guichard tenait à son épouse sur le talent de ses filles :

« Avec des natures comme celle de vos filles, ce ne sont pas des petits talents d'agrément que mon enseignement leur procurera ; elles deviendront des peintres. Vous rendez-vous bien compte de ce que cela veut dire ? Dans le milieu de la grande bourgeoisie qui est le vôtre, ce sera une révolution, je dirais presque une catastrophe. Êtes-vous bien sûre de ne pas me maudire un jour ? »

C'est en effet la mère des sœurs Morisot qui leur avait offert des leçons de peinture pour faire une surprise à son mari qui, lui-même, avait étudié l'architecture et était amateur d'art. Le père venait d'être nommé à la Cour des Comptes, mais selon les souvenirs rapportés par Tiburce, le jeune frère de neuf ans, l'enseignement de Geoffroy-Alphonse Chocarne, dans le style néo-classique, ne plaisait pas du tout aux jeunes filles. Et comme l'École des beaux-arts n'était pas ouverte aux femmes, Madame Morisot trouva un autre professeur, Joseph Guichard, dont Edma et Berthe apprécièrent beaucoup l'enseignement.

Cependant, après avoir rencontré les copistes au Louvre, notamment Fantin-Latour qui s'enthousiasmait pour Horace Lecoq de Boisbaudran et ses méthodes originales, Edma et Berthe demandèrent à Guichard des leçons de peinture en plein air. Guichard les confia au paysagiste Achille Oudinot, qui les confia à son tour à son ami Jean-Baptiste Camille Corot.

La famille Morisot loua une maison à Ville-d'Avray, pendant l'été, pour que les jeunes filles puissent peindre auprès de Corot, qui devint bientôt un familier de leur domicile parisien rue Franklin. Comme il était opposé à toute forme d'enseignement traditionnel, on ne sait pas si Corot donna souvent des leçons aux jeunes filles, et dans quel lieu1. On remarque néanmoins que Berthe tient de lui sa palette claire et son goût pour les traces apparentes de pinceaux, ou pour les petites études de paysages



Morisot 6En 1863, il y eut un phénomène qui devait marquer l'histoire de l'art : le Salon de peinture et de sculpture accepta les toiles de Corot. Mais il refusa un si grand nombre d'artistes parmi les cinq mille qui présentaient des œuvres, et cela créa un tel scandale, que l'empereur ouvrit un autre Salon : le Salon des refusés.

Cette agitation n'empêchait pas les sœurs Morisot de préparer leur premier envoi au Salon de 1864. Les Morisot louèrent une ferme dans un quartier de Pontoise nommé « Le Chou », sur les bords de l'Oise, près d'Auvers-sur-Oise. Edma et Berthe furent alors présentées à Charles-François Daubigny, Honoré Daumier et Émile Zola.

Pour son premier envoi, Berthe fut admise au Salon Deux critiques d'art remarquèrent les tableaux des sœurs et notèrent l'influence de Corot, mais on leur accorda peu d'attention.

L'année suivante, l'envoi de Berthe au Salon de 1865 fut remarqué par Paul Mantz, critique d'art à la Gazette des beaux-arts, qui y voyait : « beaucoup de franchise et de sentiment dans la couleur et la lumière

Au Louvre, les deux sœurs ont rencontré Édouard Manet avec les copistes. Les parents Morisot donnaient des soirées où ils rencontraient les Manet. Madame Manet-mère donnait également des soirées où elle recevait les Morisot, et tout ce monde se retrouvait encore aux soirées de monsieur de Gas (père d'Edgar Degas) où étaient présents Charles Baudelaire, Emmanuel Chabrier, Charles Cros, James Tissot, Pierre Puvis de Chavannes . Cette bourgeoisie d'avant-garde était alors très mondaine. On apprit que Degas avait été amoureux d'Edma, et que Manet avait exprimé son admiration pour le travail de cette même jeune fille. Le salon des Morisot était fréquenté par un nombre croissant de célibataires, parmi lesquels se trouvait Jules Ferry auquel Tiburce Morisot dénonça les dangers du baron Haussmann et ses projets urbains grandioses. Les deux sœurs avaient confié des toiles au marchand Alfred Cadart, dont elles attendaient beaucoup et qui se révéla décevant, mais madame Morisot s'inquiétait moins, désormais, pour la carrière de ses filles que pour le choix de leurs époux : Yves venait d'épouser en 1866 Théodore Gobillard, un fonctionnaire mutilé d'un bras pendant la campagne du Mexique. Edma épousa deux ans plus tard Adolphe Pontillon, officier de marine, ami de Manet, avec lequel elle partit pour la Bretagne.

Après avoir passé un dernier été avec ses deux sœurs en Bretagne, chez Edma, Berthe commença une carrière indépendante. La plupart des critiques -sauf Émile Zola, ardent défenseur de Manet- négligèrent les œuvres de Berthe et Edma Morisot, cette année-là. À cette époque, le mépris pour les femmes-peintres atteignait des sommets, et Manet écrivait à Fantin-Latour « Je suis de votre avis, les demoiselles Morisot sont charmantes, c'est fâcheux qu'elles ne soient pas des hommes. Cependant, elles pourraient, comme femmes, servir la cause de la peinture en épousant chacune un académicien et en mettant la discorde dans le camp de ces gâteux ». Mais Berthe poursuivit sa carrière.

Le 19 juillet 1870, éclatait la guerre entre la France et la Prusse. Les frères Manet, Degas, Félix Bracquemond et d'autres artistes, étaient engagés dans la Garde nationale. Berthe accepta de partir pour Saint-Germain-en-Laye avec sa mère, mais après avoir rejoint Edma à Cherbourg où elle peignit, elle refusa de quitter la France et revint à Paris quelques mois plus tard   alors que les combats s'intensifiaient autour de Paris et que la santé de la jeune fille était mise à rude épreuve. Berthe cessa de peindre pendant un temps.

Morisot 5Il y eut ensuite un chassé-croisé d'influences mutuelles, d'emprunts parfois imperceptibles, de Manet à Morisot et inversement.

La même année, Berthe réalisa Vue de Paris des hauteurs du Trocadéro, , mais elle n'était pas contente de son travail car elle écrivit à Edma « (...) comme arrangement, cela ressemble à du Manet. Je m'en rends compte et je suis agacée »

L'atelier de Berthe à Passy avait été endommagé par la guerre. Elle cessa de peindre un temps et préféra poser pour Manet qui, déprimé par la guerre, n'arrivait plus à travailler

Au début de l'année 1872, par l'intermédiaire d'Alfred Stevens, le marchand Paul Durand-Ruel vint dans l'atelier de Manet et lui acheta vingt deux toiles. Au début juillet, Berthe demanda à Manet de montrer un de ses paysages de bord de mer à Durand-Ruel qui acheta une et trois aquarelles de Berthe.

Peu à peu, Berthe allait s'écarter des couleurs sombres de Manet pour adopter des couleurs de plus en plus claires.

La maîtrise de Berthe commençait à subjuguer ses camarades qui la reconnaissaient comme une artiste à part entière, en particulier Edgar Degas. Elle commençait à se détacher des couleurs un peu sombres pour adopter des tons de plus en plus clairs, qu'elle tenait de Corot. Parfois ses couleurs étaient éclatantes comme sur la toile Intérieur que le jury du salon de 1872 refusa, ce qui indigna Puvis de Chavannes. Manet qui suivait toujours de très près le travail de Berthe se laissa peu à peu influencer par les teintes claires .

Morisot 8

Le Berceau marque une étape dans l'évolution de Berthe : « La façon dont Berthe peint cette enfant avec des blancs détrempés, des gris frottés et des petits points roses parsemés sur le bord du tissu suppose un pinceau extraordinairement libre qui contraste avec les traits nettement dessinés de la mère. »

C'est de cette époque que date le plein épanouissement de Berthe

À l'été 1874, Berthe passa ses vacances à Fécamp avec Edma, ses enfants, et des amis de la famille qui posèrent pour elle. En vacances non loin de là, Eugène Manet, âgé de quarante et un ans, venait parfois peindre aux côtés de Berthe et surtout la courtisait. Le 22 décembre suivant, Berthe l'épousait. Cette année-là, Édouard fit de Berthe deux magnifiques portraits

Le Salon de 1873 avait été houleux. Les artistes qui s'étaient vus refuser leurs travaux se plaignaient des choix conservateurs du jury. Berthe n'eut qu'un seul tableau accepté, Blanche , pastel sur papier 24 × 33 cm, œuvre très conventionnelle. Mais déjà, un groupe d'artistes composé de Monet, Pissarro, Sisley, Degas, avaient signé une charte, projetant d'organiser une coopérative : La Société des artistes français, qui allait prendre le nom de Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs à laquelle Berthe adhéra après la mort de son père. Elle abandonnait le Salon officiel pour les expositions impressionnistes dont elle allait être l'un des éléments marquants. Ceci en dépit des conseils de Puvis de Chavannes, et du refus de Manet, qui venait de recevoir une médaille au salon de 1873 et qui ne voulait pas se joindre au groupe, « ...prouvant ainsi que pour être admis, il faut faire au goût officiel d'énormes concessions » . Les discussions étaient vives.

La première exposition eut lieu dans les Salons Nadar, 35 boulevard des Capucines, là où se trouvaient les anciens ateliers de Nadar. Vingt neuf artistes y participaient, Berthe étant la seule femme . Une semaine avant l'ouverture de l'exposition, Puvis de Chavannes lui envoya une lettre pour la mettre en garde contre le fiasco de cette entreprise. Mais rien n'arrêta la jeune femme. Elle affirmait ainsi son indépendance vis-à-vis de Manet qui s'était détourné de cette exposition contestataire. Berthe exposa quatorze huiles, trois pastels et trois aquarelles.

Trois mille cinq cents visiteurs se bousculèrent, la critique vint en nombre. La plus remarquée fut celle parue le 25 avril dans Le Charivari signée Louis Leroy, qui, reprenant dans son article le titre d'un des tableaux de Monet Impression, soleil levant, donna son nom au mouvement impressionniste : « ... Mais l'impression, devant le boulevard des Capucines (...) En voilà de l'impression ou je ne m'y connais pas (...) Je me disais aussi, puisque je suis impressionné, c'est qu'il y a de l'impression là-dedans. »

Eugène soutenait déjà Berthe à l'été 1874, au moment où la presse ridiculisait la jeune fille, l'accusant de se donner en spectacle. Mais Berthe poursuivait avec ardeur dans la voie qu'elle avait choisie. Elle s'affirmait, abandonnant un tableau dont le fond n'était pas terminé et le conservant pour le vendre, alors qu'autrefois, elle aurait détruit une œuvre inachevée. Elle participa à une vente aux enchères à Drouot où douze de ses œuvres furent vendues.

Ce fut un scandale. Renoir racontait qu'un détracteur avait qualifié Berthe de prostituée et que Pissarro lui avait envoyé son poing dans la figure, ce qui avait déclenché une bagarre. La police fut appelée en renfort.

Morisot 7Manet encourageait les journalistes à apporter leur soutien à cette vente, alors que le journal Le Figaro dénonçait les tendancesrévolutionnaires et dangereuses de la première exposition impressionniste dans une violente diatribe signée Albert Wolff. Le journaliste traitait les artistes d'aliénés : « Il y a aussi une femme dans le groupe comme dans toutes les bandes fameuses ; elle s'appelle Berthe Morisot et est curieuse à observer. Chez elle, la grâce féminine se maintient au milieu des débordements d'un esprit en délire. » Eugène avait l'intention de le provoquer en duel, mais Berthe et ses camarades le détournèrent de ce projet

Berthe, désormais plus sûre d'elle, chercha à vendre ses toiles. Édouard et Eugène l'encouragèrent à les envoyer à la galerie Dudley de Londres qui n'en exposa aucune. En revanche, Hoschedé acheta chez Durand-Ruel. Certains critiques d'art commentaient l'évolution de son style en regrettant qu'elle poussât aussi loin la recherche impressionniste :« Elle pousse le système impressionniste à l'extrême et nous le regrettons d'autant plus qu'elle possède des qualités rares comme coloriste. Plusieurs de ses toiles représentent des vues de l'île de Wight et on ne peut pas les reconnaître (…) Mademoiselle Morisot est une impressionniste si convaincue qu'elle peut peindre jusqu'au mouvement de chaque chose inanimée. »

Les expositions de ceux que Wolff qualifie « d'aliénés » se poursuivent jusqu'en 1886, avec beaucoup de difficultés, mais beaucoup d'enthousiasme. Il y en eut huit, la troisième financée par Gustave Caillebotte. Berthe participe à toutes sauf à la quatrième (1879), car elle a fort à faire avec sa fille Julie née le 14 novembre 1878. Les femmes-peintres sont brillamment représentées cette année-là par Marie Bracquemond et Mary Cassatt..

Elle est en passe de devenir une des figures de proue du groupe impressionniste, en même temps que l'américaine Mary Cassatt, venue vivre à Paris en 1874. Mais la critique conventionnelle s'offusque de sa peinture « féminine », sauf Mallarmé qui lui apporte un soutien enthousiaste.

Toutefois, les tableaux de Berthe intéressent moins les critiques d'art que ceux de Renoir, de Caillebotte, ou de Monet. Ils parlent surtout de « ... ses exquises harmonies blanches et argentées . » 

Dès 1881, Berthe Morisot et Mary Cassatt apparaissent comme les chefs de file de la nouvelle tendance impressionniste aux yeux des critiques : pour la première fois dans toute l'histoire de l'art, des femmes sont considérées comme les maîtres incontestés d'un mouvement d'avant-garde.

Morisot 9Berthe fait preuve d'encore plus d'audace que les années précédentes, ce qui indigne deux critiques qui l'avaient appréciée jusque là : Paul Mantz et Charles Ephrussi : « Madame Morisot a fini par exagérer sa manière au point d'estomper des formes déjà imprécises. Elle ne fait que des débuts de débuts ; le résultat est curieux, mais de plus en plus métaphysique. Il faut évidemment des talents de coloristes pour tirer du néant cette délicatesse. » Charles Ephrussi est scandalisé par les pastels : « Un pas de plus et distinguer ou comprendre quoi que ce soit deviendra impossible. »

À partir de 1880, Berthe avec sa famille passe tous ses étés dans une maison de campagne de Bougival, et, à partir de 1881, ils résident plusieurs hivers à Nice. Ces deux lieux inspirent à Berthe un grand nombre de toiles qu'elle présente aux dernières expositions révolutionnaires.

De la peinture de Berthe Morisot, Gustave Geffroy dit :

« Les formes sont toujours vagues dans les tableaux de Mme Berthe Morisot, mais une vie étrange les anime. L’artiste a trouvé le moyen de fixer les chatoiements, les lueurs produites sur les choses et l’air qui les enveloppe… le rose, le vert pâle, la lumière vaguement dorée, chantent avec une harmonie inexprimable. Nul ne représente l’impressionnisme avec un talent plus raffiné, avec plus d’autorité que Mme Morisot. »87

Vers 1886-1887 Berthe se mit à explorer de nouvelles techniques : sculpture, pointe sèche, qui constituaient un défi pour la coloriste virtuose qu'elle était. Elle réalisa en 1886 un buste en plâtre blanc de sa fille Julie, que Monet et Renoir l'encouragèrent à exposer chez Georges Petit  chez qui ils avaient exposé eux-mêmes. Petit était un homme d'affaires avant tout : il demandait aux artistes de lui laisser une partie de leurs œuvres en compensation de ses frais. Berthe accepta ses exigences, mais Petit ne réussit pas à vendre une seule de ses sept œuvres.

En février 1887, Berthe fut invitée à exposer à Bruxelles avec un groupe d'artistes d'avant-garde : le Groupe des XX où Georges Seurat et Pissarro exposaient aussi.

Vers 1886-87, Berthe commença à traiter des nus au pastel, au fusain, à l'aquarelle, tous exécutés dans des tons très doux.

Le couple Manet était à ce moment-là dans le sud de la France. De retour à Paris, Berthe loua une maison à Mézy au Nord Ouest de Paris. Elle s'était aperçue que la santé d'Eugène n'était pas bonne et elle peignit très peu pendant un temps. « Elle trouvait qu'elle et son mari avaient vieilli prématurément et elle éprouvait de la nostalgie au spectacle de sa fille et de ses nièces qui apprenaient à dessiner, peindre, jouer de la musique. Berthe sentait venir la fin de sa vie. »

Berthe fit malgré tout aménager une grange en atelier et elle prit les enfants de Mézy comme modèles, mais Renoir la pressait de terminer une toile décorative dans l'esprit du "Printemps" de Botticelli, commencée à Nice en 1888. Berthe fit de nombreuses études préparatoires pour cette toile « Le Cerisier » Elle faisait désormais un grand nombre d'études préparatoires pour tous ses tableaux.

Mais la santé d'Eugène, âgé de 59 ans, déclinait de plus en plus. Il mourut le 13 avril 1892.

Berthe avait décliné l'invitation du Groupe des Vingt pour l'exposition de Bruxelles du début 1892, mais Eugène l'avait poussée à organiser une grande exposition individuelle à la galerie Boussod et Valladon. Cette galerie, fondée par Adolphe Goupil n'était pas favorable aux impressionnistes. Elle fit de la résistance assez longtemps, même lorsqu'elle fut reprise par Bousod, le mari de la petite fille de Goupil, et Valadon, son beau-frère. Elle ne commença à s'ouvrir aux impressionnistes que sous l'influence éphémère de Théo van Gogh.

Morisot 3

L'exposition rencontra un accueil très favorable. Degas lui dit que sa peinture vaporeuse cachait un dessin de plus en plus sûr, ce qui était le compliment suprême. Gustave Geffroy de La Vie artistique lui consacra des pages très élogieuses. L'année suivante, Berthe rendit visite à Monet, à Giverny, pour admirer ses cathédrales et pour conjurer sa tristesse : sa sœur, Yves Gobillard, venait de mourir.

Caillebotte ayant légué sa collection au musée du Luxembourg pour y faire entrer l'impressionnisme, on s'aperçut qu'il ne possédait pas une seule toile de Berthe Morisot. Sur instance de Mallarmé, l'État français acquit pour le musée du Luxembourg « Jeune femme en toilette de bal1 » pour que l'une des figures de proue du mouvement impressionniste soit représentée.

Berthe Morisot tomba malade à la mi-février 1895. Elle mourut le 2 mars 1895 au 10 rue Weber à Paris, et légua la plupart de ses œuvres à ses amis artistes : Degas, Monet, Renoir. Malgré sa riche production artistique, le certificat de décès mentionnait : « sans profession ». Elle est enterrée dans le caveau des Manet au cimetière de Passy où il est simplement gravé : « Berthe Morisot, veuve d'Eugène Manet ».

La mort de l'artiste n'entraîna cependant pas la dispersion du groupe impressionniste ; ses compagnons de lutte aimaient et protégeaient sa fille, dont Mallarmé était le tuteur et que Renoir emmenait peindre avec lui. Degas la maria en 1900 au fils d'Henri Rouart. Pour le premier anniversaire de sa mort, Durand-Ruel, aidé de Degas, Rouart et de sa fille Julie organisèrent une rétrospective de ses œuvres1d'environ trois cents à quatre cents toiles

Morisot 91

Paul Valéry, qui épousa sa nièce, Jeanne Gobillard, écrivit un essai sur Berthe en 1926 et le dédicaça à Édouard Vuillard. Il dira plus tard « La singularité de Berthe Morisot fut de vivre sa peinture et de peindre sa vie, comme si ce lui fût une fonction naturelle et nécessaire, liée à son régime vital, que cet échange d'observation contre action, de volonté créatrice contre lumière102. »


Yves Rouart qui avait dans un premier temps assigné l'Académie des beaux-arts et signé en 2000 un protocole d'accord révisable avec les exécuteurs testamentaires, a contesté ce protocole  « S'il s'avère que la très belle collection de Morisot doit être retirée du musée Marmottan ce serait une grande perte pour le public et pour l'État français ». La collection d'Anne-Marie Rouart comprenait en outre le célèbre portrait de Berthe Morisot par Manet. Il devait être vendu pour payer la succession par les exécuteurs testamentaires. L'État français s'est opposé à la vente de cette œuvre à l'étranger et l'a rachetée pour plusieurs millions d'euros. C'est aujourd'hui une des pièces maîtresse du musée d'Orsay.

En 2013, le musée Marmottan-Monet héberge encore environ 80 tableaux de Berthe Morisot .

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il faudra qu'on dise de moi, celui-là n'a jamais appartenu à aucune école, à aucune église, à aucune institution, à aucune académie, surtout à aucun régime, si ce n'est le régime de la liberté
( Gustave Courbet )
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